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mardi 3 novembre 2020

Amazon, le prédateur ultime dans un marigot désert

Le tyrex Amazon est en train de dévorer les lézards qui eux-mêmes ont eu la peau des épiceries de quartier, tuant au passage notre industrie. (Photo DR)

Dans un élan de patriotisme économique mâtiné de régionalisme survivaliste, tout le monde boycotte Amazon. Enfin, en théorie, si j'en juge par le nombre de colis qui encombrent l'arrière salle de mon épicier et le bureau de poste de mon village. Les gens en ressortent les bras chargés de colis, l'air sombre, le regard fuyant, honteux, une excuse au bord des lèvres : "Non mais j'avais commandé avant.. Je n'avais pas le choix...."

Leurs paquets rejoignent dans la malle arrière les sacs plastiques du supermarché du coin, remplis de bouffe industrielle, de boissons sucrées américaines, de fringues fabriquées au Bengladesh et de gadgets made in China.

De quoi devraient s'excuser les victimes de la mondialisation ?

Mais pourquoi devraient-ils s'excuser ? Leurs parents ont dû fermer leur épicerie quand le Mammouth a ouvert dans la zone industrielle. Ils ont perdu leur boulot quand l'usine d'électro-ménager pour laquelle ils avaient quitté la terre a été délocalisée au Maroc. Ils ont été expropriés de ce qu'il restait de la ferme familiale quand la rocade à effacé leur hameau. Ils sont alors allés s'entasser dans un programme immobilier de banlieue où le Français n'est aujourd'hui plus qu'un dialecte parmi d'autres.

A qui devraient-ils présenter leurs excuses ? Au patron de la galerie marchande ? A leur maire qui en a coupé le ruban ? Aux gérants des H&M-Zara-Celio-Kiabi-La-Halle qui importent des T-shirts fabriqués par des esclaves pour eux, chômeurs ?

Le Mammouth s'est éteint à l'heure du réchauffement climatique, non sans avoir écrasé la concurrence artisanale. (photo DR)


Le commerce de centre-ville, une icône bobo

A l'exception notable des artisans, le commerce de centre-ville n'est que le souvenir d'un mode de vie sacrifié, un gadget pour bobo qui promène sa progéniture mal élevée en draisienne Nature et Découverte. Hormis dans les boulangeries, boucheries, charcuteries, restaurants... on y vend soit des cochonneries manufacturées dans le tiers-monde pour le quart-monde local, soit des denrées de luxes inaccessibles au commun.



Le prédateur ultime

Amazon est l'ultime prédateur du commerce de l'ère ultra-libérale. Un emploi créé en périphérie en tuait trois au temps des trente glorieuses. Un manutentionnaire embauché sur une plateforme de e-commerce flingue sans doute trois emplois de caissières de chez Leclerc. I

Alors oui, une paire de mocassins André vendue dans le magasin du coin y subventionne un bout d'emploi, le trottoir qui borde l'enseigne, l'école et l'hôpital. Mais combien plus finançaient les usines de Nancy et d'Arpajon, quand des centaines de petites mains y travaillaient ? 

La grande distribution a brisé notre modèle sociétal. Elle a déchiré le tissu économique en poussant à la délocalisation pour vendre toujours plus, toujours moins cher. Le commerce franchisé n'est rien d'autre que sa déclinaison spécialisée. Et je ne vois toujours pas au nom de quoi il serait préférable d'entretenir ce modèle-là.

Demeure le cas particulier des librairies, commerce de la culture quand il se risque hors des sentiers battus. Mais il faut croire que celui-là n'est plus qu'un faire-valoir d'une contestation pour la forme.

mardi 27 octobre 2020

Du chaos naît l'aventure : la fabrique des bâtards

La fabrique des bâtards est avant tout l'histoire d'une traque, une aventure, dans un contexte de troubles majeurs. 

Il y a deux manières de bouleverser la société : par la réforme progressive et par la révolution. Pour la première fois de l'histoire, une civilisation est soumise à l'anéantissement des fondements de son organisation sociale et de ses valeurs. Est-ce une réforme ou une révolution ? Peu importe. Le désespoir pousse le peuple dans la rue. Des communautés s'affrontent et l'Etat est au bout de ses contradictions.

L’histoire de la fabrique des bâtards tire sa source de l’expérimentation de l’hypothèse émise par Yann Moix : “ La vraie révolution, la vraie égalité totale, ce serait de mélanger les bébés à la naissance comme dans La vie est un long fleuve tranquille. On devrait interdire aux parents d'élever leurs enfants biologiques. “ Et naît un enfant supposé ne connaître ni son père ni sa mère. Une technostructure le désigne rejeton d’un couple d’hommes. La société avance. Le progrès est une machine. 

Les temps barbares

Comme toute machine, il est à la merci d’une défaillance. L’imprévu survient. Non pas une malfaçon, mais une poussière d’orgueil, la volonté d’un individu, le sursaut d’une conscience. Le destin de cet homme bascule dans le chaos que génère son geste. Des temps barbares précipitent les familles sur les routes. Des clans s’affrontent. Des forces occultes ourdissent des complots. Un règne nouveau vient pulvériser les ambitions progressistes. Les utopies résistent mal à la violence du réel. 

Du chaos surgit l’aventure. Là seulement s’exprime le romanesque d’où l’espoir peut tracer ses perspectives. Il faut à la vie des circonstances singulières pour muter en destin. Et seul le destin dispose du pouvoir d’enrayer les révolutions. 

La fabrique des bâtards - roman 

Disponible ici en numérique et en format broché

jeudi 22 octobre 2020

Typographie épicène pour alphabet inclusif, la langue à l'envers

Une typographie "épicène" au service de l'alphabet inclusif. Ou l'alpha et l'oméga de la dictature de la pensée conforme. 

Le nouvel alphabet compte désormais environ 66 lettres, soit une quarantaine de plus que les 26 que vous avez apprises avec votre instituteur. Bon courage pour les réciter dans l'ordre puis à l'envers. D'autant que les nouveaux signes n'ont ni nom ni phonème. De surcroit, l'inflation menace ce coup de génie salué par prix Art Humanité remis à Genève ce 16 octobre par la Croix Rouge : il est "appelé à évoluer".

Les quarante nouvelles lettres ont fait leur apparition à travers une typographie créée par un graphiste, dont le but était d'imaginer "des signes permettant de marquer l'«inclusivité» et de ne plus différencier les genres dans notre langue." Relate le Figaro. 

Tristan Bartolini, le génial inventeur de cet alphabet s'est contenté de tarabiscoter des lettres de début et de fin de mot de manière à générer des signes "épicènes" (non genré) selon lui. Ainsi, les mots parrain et marraine se trouvent-ils confinés en p[m]arrain[e] à travers la création de deux signes : le premier regroupant le p et le m et le second mêlant le n au e.... Un mauvais bouillon de poule à l'alphabet, impossible à prononcer et qui fiche la migraine.

Inutile de s'étendre sur l'opportunisme bien-pensant de cette démarche, c'est surtout sa nature totalitaire qui est intéressante. La langue française évolue par son usage. Les mots pénètrent dans le dictionnaire et en sont chassés au gré de leur apparition dans le langage de la rue, puis à l'écrit, après d'infinies précautions.

L'écriture inclusive et cet avatar typographique ne sont rien d'autre que des tentatives de contraindre la pensée en tordant son principal outil, le langage, à travers sa représentation, l'écrit. La bonne nouvelle, c'est que personne n'a encore trouvé le moyen de contraindre la langue. La mauvaise, c'est que les génies non-genrés de ce genre d'expérience n'ont pas tous dits leur dernier mot.